Le couple à l’épreuve du télétravail : « Il empiète sans arrêt sur mon espace »

Rédigé le 08/06/2020


Partager son bureau à domicile avec son conjoint peut vite virer à la guerre de tranchées. Certains découvrent leur partenaire sous un nouveau jour, pas toujours très flatteur.

On s’est unis pour le meilleur et pour le pire… S’était-on pour autant engagé à télétravailler amoureusement à ses côtés ? Si 14 % des couples se rencontrent au travail (enquête Ifop, 2018), combien de tandems télétravaillent harmonieusement depuis l’apparition du Covid-19 ? Vivant et bossant sous le même toit, tels des coworkers sans l’option café latte, parfois en huis clos depuis des semaines, certains couples savourent cette parenthèse tandis que d’autres rêvent de mettre un terme à cet incessant coude-à-coude et aux bisbilles quotidiennes.

Iris est de celles pour qui le télétravail est idyllique, offrant à son couple des moments de complicité, sans enfant ni répartition des tâches ménagères pour semer la zizanie. « Mon compagnon et moi sommes installés en quinconce sur la table de la salle à manger. Il a une réunion d’équipe tous les matins, “un stand-up” comme ils disent. » Aucun signe d’exaspération dans la voix de la jeune femme qui vit à 20 km d’Amiens. Pendant ce temps, elle se consacre à la conception d’un dessin animé.

« Lui est programmeur, ce qui veut dire qu’il tape beaucoup, oui beaucoup, sur son clavier. Et il parle à sa machine aussi. Ça ne me dérange pas, je parle aussi à la mienne, reconnaît-elle, amusée. J’aime travailler en musique, et lui a besoin de concentration, alors on a trouvé un compromis : je mets de la musique sans paroles, souvent de la musique de film. Et je coupe s’il doit parler à des collègues. » 

« Trog grande promiscuité »

Benoît, 57 ans, est délégué territorial. Marié depuis trente ans, il trouve lui aussi des bienfaits au télétravail en duo. Le couple parisien a pu s’aménager des espaces séparés pour œuvrer au calme. Ils se retrouvent à l’heure du déjeuner, et chaque soir – « ce qui n’arrive pas toujours en temps normal, du fait de nos fréquents déplacements professionnels en région ». Ce temps retrouvé est un acompte sur les vacances à venir. « Nous finissons par appréhender la séparation avec le retour au bureau », admet-il. 

Tout le monde ne vit pas aussi sereinement la transformation du logement en espace de coworking. « Le risque majeur du confinement, et du télétravail qui s’est imposé avec la crise sanitaire, est qu’il abolit les limites dans l’espace du domicile, ce qui aboutit à un enchevêtrement lié à une trop grande promiscuité », souligne Yves-Alexandre Thalmann, psychologue clinicien et professeur de psychologie en Suisse, pour qui, faute d’espaces de respiration pour le couple, « cela exacerbe tout ce qu’il y a à exacerber ».

Par z