Paiement mobile, magasins sans caisses : les pistes de Carrefour pour fluidifier le parcours client

Rédigé le 13/07/2020


Carrefour franchit une nouvelle étape sur le paiement mobile avec l'activation automatique de la carte de fidélité sur Apple Pay. Android suivra. Le distributeur expérimente aussi un parcours d'achat sans scan des produits. Entretien avec Marie Cheval, directrice exécutive des hypers et des services financiers pour Carrefour. 

Marie Cheval, directrice exécutive des hypers et des services financiers pour Carrefour (photo Julien Millet)

Carrefour a lancé cette semaine un nouveau partenariat avec Apple. Il est désormais possible d'associer automatiquement sa carte de fidélité, déposée dans le "portefeuille" Apple Wallet, aux paiements sur mobile via Apple Pay. Pour tout achat chez Carrefour, même sans carte Pass. 

Nous pensons qu'il existe une vraie opportunité pour développer les paiements sans contact, par carte ou avec son mobile. On a vu les usages se multiplier pendant la crise du covid-19. Nous enrichissons aujourd'hui le dispositif avec une fonctionnalité qui est utile au client : en un seul "tap" avec votre mobile, vous réglez vos achats et vous cagnottez (ou décagnottez) votre compte de fidélité. Sans activer de carte supplémentaire. Le passage en caisse est ainsi le plus fluide possible. 

 

Le paiement sur mobile est encore très minoritaire en France. Chez Carrefour, où il existe depuis 2016, il était jusqu'à présent réservé aux porteurs de la carte Pass, sur iPhone (Apple Pay) ou Android (Carrefour Pay). Dans quelle mesure son usage s'est-il répandu en magasins ? 

L'usage est encore faible, comme dans l'ensemble de la distribution en France. Le paiement sur mobile représente moins de 5% des transactions. Mais les clients, notamment les plus jeunes, "s'enrôlent" facilement si le service apporté est bien conçu. On le voit avec les premiers retours sur Apple Pay depuis le début de la semaine. Ou, par exemple, avec Scanlib by phone. Cette solution de self-scanning avec son mobile, que nous sommes en train de déployer, nécessite encore pour l'instant le téléchargement d'une application à part (à terme, elle sera intégrée à l'appli Carrefour). Mais ce n'est visiblement pas un frein au recrutement. Avec la crise du covid-19 et les inquiétudes sur l'hygiène des scanettes en magasin, elle est même plébiscitée. 

 

L'activation automatique de la carte de fidélité sera-t-elle bientôt aussi proposée pour les paiements avec les mobiles Android ? 

Le sujet est complexe. Il a fallu plus d'un an à Market Pay, la fintech du groupe Carrefour dédiée aux solutions de paiement, pour franchir ce pic technique avec Apple. Nous sommes d'ailleurs les premiers en Europe à l'avoir fait. Mais nous travaillons, bien sûr, à un lancement sous Android. 

 

Le paiement sur mobile, en se développant, va-t-il aussi vous permettre de communiquer d'une façon différente avec vos clients ? En poussant des notifications d'un nouveau genre ? Ou, pourquoi pas, en mettant enfin un terme à l'impression des coupons papier en caisse ? 

Le paiement et la fidélité sont deux sujets distincts. Le paiement relève de l'intime pour les clients. Il faut lui laisser sa liberté de choix, tout en lui offrant de la sécurité. La fidélité, c'est un lien entre une enseigne et un client. Quant aux coupons papier, ils disparaîtront sans doute à terme mais ils jouent aujourd'hui un rôle complémentaire des autres canaux de communication. Notamment pour les clients ne possédant pas de carte de fidélité. 

 

Quels enseignements tirez-vous de l'expérimentation, au siège du groupe, d'un petit magasin sans caisses, façon Amazon Go ? Ce concept "ultime" de parcours fluide, sans aucun scan des articles, est-il prêt à être déployé ? 

La phase d'expérimentation est toujours en cours, le magasin test a rouvert après le confinement. Le premier sujet, c'est l'identification des produits achetés par les clients et, honnêtement, c'est assez bluffant. Le paiement sans contact, ensuite, peut être dématérialisé ou réalisé en utilisant un terminal classique, présent sur place. 

 

Le dispositif pourrait-il être proposé au grand public ou est-il mieux adapté à des lieux fermés, comme de grandes entreprises, dans lesquels tous les clients potentiels sont déjà badgés ? 

Le critère est davantage celui de la taille que de l'environnement. Le dispositif fonctionne sur des surfaces assez réduites, ce serait plus compliqué en hypermarché. Mais le milieu n'a pas besoin d'être fermé. La question, là encore, est celle de "l'enrôlement" des clients, de leur capacité à accepter de télécharger une application supplémentaire. Ce qui n'est pas si compliqué quand la prestation est bien pensée. 
 

Benoît MERLAUD