Carrefour : Alexandre Bompard au milieu du gué

Rédigé le 23/10/2019


PORTRAIT - Alors que Carrefour vient de dévoiler ses résultats trimestriels, Challenges publie le portrait de son PDG, Alexandre Bompard. Auréolé du succès de la fusion entre la Fnac et Darty, il tente depuis l'été 2017 de redresser le premier distributeur européen. Une mission ardue dans un secteur en mutation et, selon lui, en voie de concentration.

 

Ce mardi 22 octobre en fin de journée, Carrefour a publié ses résultats pour le troisième trimestre 2019. Si le groupe se réjouit de confirmer les objectifs financiers du plan Carrefour 2022, dont certains résultats commencent à apparaître, les difficultés de Carrefour sont loin d'être résolues. Les ventes en France déclinent de 0,9 % à magasins comparables. Pis, les hypermarchés français, qui en représentent la moitié, dégringolent de 3,6%. A cette occasion, Challenges publie le portrait d'Alexandre Bompard, PDG d Carrefour, à la manoeuvre depuis juillet 2017.
 

Mardi 1er octobre, notre taxi tente d’entrer dans Massy. La ville de l’Essonne klaxonne, bouchonne, transpercée par le chantier du futur métro. Des panneaux alertent: "Carrefour modifié", "Carrefour en travaux". Ils ne croient pas si bien dire. Car au 93, avenue de Paris, le distributeur est lui aussi en plein travaux depuis la nomination de son chef de chantier, Alexandre Bompard. En janvier 2018, alors que les marteaux-piqueurs attaquent Massy, 25 kilomètres plus loin, à la Défense, le PDG lance, lui, un colossal plan de transformation. Réduire la taille des hypers, atteindre 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires dans le bio, autant en e-commerce alimentaire, supprimer des milliers d’emplois… Tout est sur la table.
 

Sous pression 

Un an et demi plus tard, le successeur de Georges Plassat nous accueille, bronzé, avec un large sourire, sans cravate, les manches retroussées. Détendu? Non. "Alexandre est confronté à l’une des transformations les plus difficiles à mettre en place au sein du CAC 40", juge son ami Arthur Sadoun, président du directoire de Publicis. Sous pression, Bompard est en pleine mêlée. Autour de lui, 380.000 collaborateurs, qu’il faut faire bouger, vite, dans la même direction. Face à lui, Amazon assène des coups d’épaule, les spécialistes Decathlon et Primark raffûtent, tandis que les coopératives Leclerc, Intermarché et Système U gagnent du terrain. Carrefour, comme les autres groupes intégrés Casino et Auchan, souffre. Freinés par leur manque d’agilité et les copieux dividendes à verser aux actionnaires, ils enchaînent plans sociaux et fermetures de magasins. En vingt ans, la valeur de Carrefour a chuté de 62,7 milliards d’euros, à 12 milliards. Sa part de marché aussi a fondu. Deux points le séparent du leader, les Centres E. Leclerc. Cet été, Michel-Edouard Leclerc a taquiné Bompard sur Twitter sur son service de livraison. Piqué au vif, le PDG de Carrefour l’a taclé en retour. "Il est sous la pression du capital impatient qui l’a recruté", analyse Leclerc. "C’est plus compliqué pour lui que pour moi."

Claire Bouleau