En 2021, les cadres du privé ont fait grimper le taux d’absentéisme

Rédigé le 09/09/2021


La proportion d’arrêts de travail chez les manageurs au cours du premier semestre 2021 est supérieure à celle des autres salariés, indique une étude de Malakoff Humanis publiée ce 9 septembre.

Alors que l’activité économique repart de plus belle, les chefs d’entreprises, inquiets, scrutent de près la courbe des arrêts pour maladie déposés par leurs employés. Mais ce sont les manageurs, épuisés par des mois de crise sanitaire, qui risquent de leur faire faux bond.
Menée en partenariat avec Harris Interactive, une étude du groupe de protection sociale Malakoff Humanis, intitulée « L’impact de la crise sanitaire sur l’absentéisme en entreprise et les risques psychosociaux », jette un éclairage instructif sur l’évolution du profil des absentéistes dans les entreprises.

Selon les résultats de cette enquête, au cours de laquelle 10 028 salariés du privé ont été interrogés, le nombre de salariés en arrêt de travail a augmenté de 30 % entre janvier et mai 2021 et la proportion d’arrêts de travail chez les manageurs explose par rapport à celle des non-manageurs : au mois de mai 2021, 23 % des premiers en moyenne ont déposé au moins un arrêt de travail, contre 13 % pour les seconds. Alors que cet écart était quasiment inexistant au 1er semestre 2020, il n’a cessé de progresser depuis.
Fatigue
Les arrêts de travail des manageurs sont aussi davantage liés à des motifs professionnels : 32 %, contre 26 % pour l’ensemble des salariés. Une évolution inédite par rapport aux enquêtes précédentes menées par Malakoff Humanis sur l’absentéisme, aux dires d’Anne-Sophie Godon : « La fatigue des manageurs est aujourd’hui un vrai sujet dans les entreprises, avance en guise d’explication la directrice des services de Malakoff Humanis. Ils ont dû veiller à la cohésion du collectif, gérer les organisations tout en maintenant leurs objectifs. »
Alors que la France entière célébrait les travailleurs de la première ligne, les manageurs, souvent invisibilisés par le télétravail, ont vu leur rôle remis en question.

La fatigue des manageurs a été pointée dans une autre étude, menée par Opinion Way pour Empreinte Humaine. En décembre 2020, ce cabinet de conseil en ressources humaines se penchait sur l’état psychologique des salariés français. Dans cette étude, 56 % des manageurs se déclaraient déjà en situation de « détresse psychologique », davantage que les autres catégories de salariés ; 35 % des collaborateurs se disaient même inquiets de l’état moral de leur manageur.

Tandis que le pays sortait d’un deuxième confinement, avant de plonger dans la troisième vague de l’épidémie, les encadrants ont dû gérer, durant de longs mois, les répercussions de la crise sur l’entreprise et ses collaborateurs.
« Une fragilisation psychologique »
Au-delà de la fragilisation des manageurs, l’étude de Malakoff Humanis alerte sur les répercussions psychologiques des multiples confinements et du stress engendré par la situation sanitaire sur l’ensemble des sondés : 41 % des 1 510 salariés interrogés dans le cadre d’un sondage complémentaire, portant sur leur état d’esprit, disent que la crise a eu un impact négatif sur leur santé mentale. « Les données présentées ici mettent en avant, non pas une explosion des risques psychosociaux, mais plutôt une fragilisation générale de l’état psychologique des salariés », soulignent les auteurs de l’enquête.

Pour les manageurs, comme pour les autres catégories de salariés, la majorité des arrêts déposés pendant cette période sont néanmoins liés au Covid-19. Arrêts de travail dérogatoires pour isolement, absences pour garde d’enfants, arrêts concernant les personnes vulnérables… Sans surprise, la pandémie a occasionné 46 % des arrêts de travail déclarés par l’ensemble des salariés dans le cadre de cette étude.

Les arrêts pour raisons psychologiques progressaient déjà avant le démarrage de la crise, alerte néanmoins Anne-Sophie Godon. Les salariés nous disent que leur santé mentale s’est dégradée. Et on n’a pas encore vu toutes les conséquences de la crise : même si on n’est plus dans une phase aiguë du télétravail, les entreprises réfléchissent à leur réorganisation. » Une remise en question qui risque de toucher, en premier lieu, le personnel encadrant.


Catherine Quignon