Covid-19 : quand et comment obtenir un arrêt de travail ?

Rédigé le 18/09/2020


C'est une question qui préoccupe de nombreux salariés et employeurs en cette période de crise sanitaire. Quels sont les cas où peuvent être délivrés des arrêts de travail ? J'ai des symptômes préoccupants, j'ai côtoyé une personne infectée, je suis positif... Que dois-je faire ?

La question se pose notamment pour les salariés qui ne peuvent pas se mettre en télétravail (dont les fameuses «premières lignes»). Voici les différentes situations relevant d'un arrêt de travail :

Les personnes présentant des symptômes

Pour les personnes présentant des signes évocateurs du Covid-19, la règle est simple : elles doivent rester isolées à leur domicile. «Dans l'attente des résultats du test de dépistage que leur a prescrit leur médecin, elles ne doivent sous aucun prétexte se rendre sur leur lieu de travail» , écrit l'Assurance Maladie sur son site internet.

La prescription de ce test par le médecin peut se faire physiquement ou à distance. En cas de symptômes évoquant la Covid-19, «la consultation peut se faire à distance ou physiquement. Mon médecin me prescrira un test virologique si cela s'avère nécessaire et me donnera des indications pour la suite», explique en effet le site officiel du gouvernement. Toutefois, précisons qu'il est aussi possible, pour toute personne, de se présenter à un laboratoire d'analyses médicales pour demander la réalisation d'un test sans prescription médicale préalable. Le test est pris en charge à 100% par l'Assurance Maladie.

Dans l'attente des résultats au test, «un arrêt de travail sera fourni si besoin par leur médecin», écrit l'Assurance Maladie. «Le médecin juge si l'état de santé du patient justifie un arrêt de travail. Dans tous les cas, si le recours au télétravail n'est pas possible, le médecin délivrera un arrêt de travail afin que son patient puisse respecter l'isolement», précise l'Assurance Maladie au Figaro.

En clair, pour les personnes qui ne peuvent pas se mettre en télétravail, l'arrêt de travail va de soi. Pour ceux qui peuvent télétravailler, cela dépend de la gravité des symptômes et de la capacité à travailler ou non. «Une personne qui a des symptômes, par exemple une forte fièvre, est malade. Elle n'est pas forcément malade du Covid mais elle est malade quand même. Donc cela peut quand même justifier un arrêt de travail», explique Marina Corrias, avocate en droit du travail.

Les personnes «contact»

Autre cas : celui des personnes «contact», c'est-à-dire les personnes ayant été en contact (conversation, repas, flirt, embrassades, accolades, etc.) avec une personne testée positive au Covid-19, mais ne sachant pas si elles ont été infectées. Ces personnes doivent rester isolées jusqu'aux résultats du test de dépistage, même si elles ne présentent pas de symptômes, écrit l'Assurance Maladie.

Ces personnes «ne doivent pas se rendre sur leur lieu de travail. Un arrêt de travail leur est délivré si nécessaire, par exemple si elles ne peuvent pas télétravailler, par l'Assurance Maladie», détaille l'organisme. En effet, l'Assurance Maladie est chargée d'appeler toutes les personnes «contact». La délivrance de l'arrêt de travail peut donc se faire suite à cet appel téléphonique.

Par ailleurs, les parents d'enfants «cas contact» peuvent également se voir prescrire un arrêt de travail par l'Assurance Maladie.

Les personnes positives

Concernant les personnes dont le test de dépistage est positif, la consigne est claire : elles doivent s'isoler pendant 7 jours. «À réception des résultats du test, le médecin prescripteur (ou l'Assurance Maladie) prend contact avec elles par téléphone pour leur expliquer les démarches à suivre et si besoin, leur délivrer un arrêt de travail pour couvrir la période d'isolement», détaille l'Assurance Maladie.

Les personnes qui ne sont pas «cas contact» mais ont croisé une personne infectée

Enfin, il existe un dernier cas, plus complexe. Celui des gens qui ne sont pas «officiellement» reconnus comme cas contact mais qui ont récemment croisé une personne testée positive au Covid. Autrement dit, il s'agit de gens qui sont passés entre les mailles du filet de l'Assurance Maladie.

Que se passe-t-il dans ce cas-là ? Interrogée sur ce sujet, l'Assurance Maladie répond que «le fait d'avoir croisé une personne diagnostiquée positive au Covid ne fait pas d'une personne un cas contact à risque». L'Assurance Maladie précise notamment : «La personne contact à risque est une personne qui, en l'absence de mesures de protection efficaces pendant toute la durée du contact, a partagé le même lieu de vie que le cas confirmé ou probable, a eu un contact direct avec un cas, en face-à-face, à moins d'1 mètre, quelle que soit la durée (conversation, repas, flirt, accolades, embrassades) ou encore a partagé un espace confiné (bureau ou salle de réunion, véhicule personnel…) pendant au moins 15 minutes avec un cas, ou étant resté en face-à-face avec un cas durant plusieurs épisodes de toux ou d'éternuement». L'organisme poursuit : «Par ailleurs, si le patient zéro a oublié de mentionner des cas contact auprès de l'enquêteur sanitaire, il peut rappeler la plateforme de contact tracing dont le numéro lui aura été préalablement communiqué lors de l'échange téléphonique».

En cas de doute, le salarié (qui n'est donc pas «officiellement» un cas contact) peut-il alors bénéficier d'un arrêt de travail, par précaution ? «Pour toute question sur son état de santé, il faut appeler directement son médecin. Si l'on est seul ou inquiet, on peut contacter le 0800 130 000 (appel gratuit)», répond l'Assurance Maladie. De son côté, Me Marina Corrias estime sur ce cas précis : «Soit le salarié est mis en télétravail, soit le salarié consulte son médecin traitant qui, je pense, lui prescrira un arrêt de travail».

Dernier point, l'employeur est-il en droit de demander le résultat du test virologique d'un salarié qui se serait absenté ? «La réponse est non, à cause du secret médical», répond Marina Corrias. «L'employeur peut néanmoins demander au salarié une attestation par laquelle le salarié atteste que le résultat du test lui permet de reprendre le travail», poursuit-elle.

Un «risque judiciaire»

Outre la question des arrêts de travail, la situation sanitaire actuelle comporte un risque judiciaire inédit pour les entreprises, explique Marina Corrias.

«L'employeur doit assurer la continuité de l'activité de l'entreprise mais aussi mettre en place des protocoles en interne, en lien avec la médecine du travail, pour faire respecter, par exemple, les gestes protecteurs et le port du masque», détaille l'avocate. Les entreprises ont en effet une obligation de sécurité envers leurs salariés.

«Les employeurs qui ne respecteraient pas les mesures de prévention visant à protéger leurs salariés face à l'exposition au Covid-19 pourraient s'exposer à un risque judiciaire, civil et pénal. De nombreux articles du Code du travail fixent les obligations à respecter en matière d'hygiène et de sécurité», poursuit Marina Corrias.

Ainsi, un employeur qui n'aurait pas mis en place des mesures de protection collectives et individuelles (masque, distanciation, sens circulatoire dans les bureaux, etc.) pourrait être condamné pour violation de l'article L 4221-1 du Code du travail par exemple, qui impose aux employeurs d'aménager les locaux de travail de manière à garantir la sécurité des travailleurs, ou encore de l'article L 4321-1 qui impose d'utiliser des équipements de travail et des moyens de protection de manière à préserver la santé et la sécurité des travailleurs.

Par Guillaume Poingt