Prix : une sombre menace pour les hypers

Rédigé le 26/06/2020


La moitié des grands hypers, en réalité, est mal placée en prix sur les références majeures. Depuis le déconfinement, la croissance du format ne repose que sur les promos mais tous les clients ne sont pas revenus. Ce qui met les distributeurs sous pression pour accélérer le rythme. 

Ce n'était pas le thème central de la dernière journée "partage et prospective" de l'Institut du commerce, ce 25 juin. Mais les chiffres qui y ont été présentés sont sans appel. Près de la moitié des grands hypermarchés français sont globalement très mal placés en prix, ce qui pénalise aujourd'hui ces magasins pour récupérer les clients perdus pendant le confinement. La promo est pour l'instant la seule source de croissance du format : autant dire que les enseignes n'ont pas fini de cravacher dans les mois qui viennent. 

Selon Nielsen, 44% des hypermarchés de plus de 7500 mètres carrés vendent en effet les références majeures… plus cher que la moyenne France tous formats confondus. Le constat met à mal l'idée reçue qui faisait du prix un atout "naturel" de l'hyper. 

Évidemment, cette segmentation des hypers par taille distingue aussi les enseignes. Leclerc, avec un parc qui jauge 4900 mètres carrés en moyenne, compte peu d'unités parmi les grands paquebots. Toutes surfaces confondues, on trouve encore un gros quart des hypermarchés français (27%) plus chers que la moyenne nationale sur les références majeures. 

Pour ne rien arranger, c'est parmi les foyers les moins aisés, donc les plus sensibles aux prix, que les hypers ont perdu le plus de clientèle avec le covid-19. Avant le confinement, selon Kantar, le format réalisait ses meilleurs scores (près de 50% de part de marché) aussi bien auprès des "urbains privilégiés" que des "inactifs précaires". Mais dans les semaines qui ont suivi, seuls les premiers sont restés plus fidèles que la moyenne. Les ménages précaires, eux, ont déserté les hypermarchés, n'y consacrant plus qu'un tiers de leur budget. 

"C'est sur la promo que la demande est élastique"

"33% des foyers inactifs précaires disent vouloir fréquenter moins souvent les hypermarchés", pointe Gaïdic d’Albronn, directrice générale de Kantar Worldpanel France. 

"L'attractivité prix réelle des hypermarchés est en question, abonde Anne Haine, directrice générale de Nielsen France. Il n'est pas possible que les consommateurs n'aient pas vu que 56% seulement des grands hypers sont bien placés en prix. Mais la relance du format reposera davantage sur la promo que sur les prix à proprement parler : c'est là que la demande est élastique."

Toujours selon Nielsen, la totalité du chiffre d'affaires gagné par les hypermarchés depuis de déconfinement repose sur des ventes sous promo. Mais avec un niveau de trafic qui stagne à -11% ou -12% sur les trois premières semaines de juin par rapport à 2019, la réaction des enseignes n'est, à l'évidence, pas encore suffisante. 

Benoît MERLAUD