Coronavirus Un employé de grande surface dénonce le manque de civisme de certains clients

Rédigé le 02/04/2020


Absence d'attestation, non respect des distances de sécurité, agressivité... : par leur manque de civisme, des clients mettent un peu plus sous pression les employés de grandes surfaces, déjà particulièrement exposés face au Covid-19.

C'est un cri du coeur qui est lancé par un employé de grande surface neversois qui préfère garder l'anonymat. « Il faut profiter de cette chance qu’on ne soit encore pas trop touché pour insister sur les gestes barrières. Il y a encore des gens qui viennent tous les jours au magasin et vous disent qu'ils ne changeront jamais leurs habitudes. C'est inconcevable ! »

Tentative de contrôle

En première ligne face au Covid-19, les employés de magasins alimentaires et grandes surfaces commencent petit à petit à prendre peur, alors que le bilan du virus s'alourdit dans la Nièvre, comme partout en France. Débordés au départ, ils ont progressivement mis en place des mesures (signalisation au sol pour les distances, vitres et visières plastiques pour les employés, etc.) pour limiter les risques de propagation du virus dans ce qui constitue leur espace de travail. Certains magasins sont même allés plus loin, comme celui de notre employé anonyme.

« On avait mis en place un vigile, avec un contrôle au niveau de l’entrée pour les clients, révèle-t-il. Au début, ça n’a pas été fait et les clients arrivaient en troupeaux. On leur demandait l'attestation de déplacement dérogatoire : ils l’avaient, ils rentraient ; ils ne l’avaient pas, ils ne rentraient pas. » Et le résultat a montré une certaine indiscipline. « Quand on a fait le contrôle, un client sur deux n’avait pas son attestation ou alors elle était mal remplie. »

 

Le problème est que, comme l'a rappelé récemment la préfecture, la pratique du contrôle d'attestation par un employé du magasin, quel qu'il soit, est illégale. Celui-ci ne peut être réalisé que par une personne assermentée. 

Ce qui ne manque pas de provoquer de la frustration chez l'employé anonyme : « On ne peut interdire les gens de venir à plusieurs. On ne peut faire aucun contrôle. Les autorités ne peuvent pas intervenir dans le magasin. » Sans compter que les forces de police ou de gendarmerie n'ont pas non plus l'autorisation d'effectuer ce type de contrôle ne serait-ce que sur le parking d'une grande surface. 

Au-delà de l'attestation, l'employé fustige le comportement de certaines personnes. « Aujourd'hui, sur une centaine de clients, vous en avez 15 qui sont en couple », assure-t-il. Ainsi il laisse entendre, en creux, que des déplacements qui pourraient être effectués seuls, se transforment, in fine, en déplacements collectifs. Un comportement qui contrevient aux messages sanitaires délivrés depuis le début du confinement par les autorités. 

L'employé dénonce également le « manque de civisme, de respect des clients ». Il n'est pas rare d'assister à « des agressions au sein du magasin », « des menaces et insultes, notamment à l’attention du vigile » – en direct voire sur les réseaux sociaux –, de constater que « des gens [...] viennent en famille et d'autres [...] jusqu'à 3 fois par jour. »

« Je peux comprendre que ce soit long, mais ils nous mettent en danger et se mettent en danger. »

Un syndicat veut limiter l'accès aux points de vente

Force Ouvrière, par la voix de son délégué syndical Carrefour Nevers-Marzy et délégué syndical national adjoint, Manuel Matéo, demande la mise en place d'un arrêté préfectoral afin de limiter « à une personne maximum par caddie l’accès à tous nos points de vente ». « Beaucoup de choses sont mises à disposition, comme le drive, justifie Manuel Matéo. Ceux qui peuvent faire autrement, il faut qu'ils restent chez eux. »

Par ce message, le syndicaliste veut « sensibiliser la clientèle ». « Ce n'est pas un combat syndical mais un combat sanitaire, enchaîne-t-il. Aujourd'hui, c'est la peur au ventre que les salariés viennent travailler. » Faisant référence à un taux d'absentéisme élevé (entre 20 % et 40 %) au sein de l'enseigne au niveau national, il prévient : « Le jour où tous les salariés seront arrêtés, je ne sais pas comment on fera tourner le magasin. »

Manuel Matéo relaie une autre demande : « Il faut que le gouvernement impose des horaires d'ouverture et de fermeture, toutes enseignes confondues. » Ceci afin d'éviter que certaines enseignes tirent avantage d'un étirement de leurs horaires, et que les clients n'en profitent alors pour se déplacer.

Le Journal du Centre